Publié le 29 Novembre 2015
Dans 2 semaines très exactement le grand concert "Notes d’Insectes" organisé par L’Agrion de l’Oise va se tenir. Oui ce sera le dimanche 13 décembre à 16h30 à l’Abbaye royale du Moncel, mais tout cela vous le savez déjà, vous l’avez noté dans vos agendas et vous avez peut-être déjà réservé vos places comme le conseillait notre article précédent.
Réserver sa place pour ce concert ? Pourquoi donc ?
Tout simplement parce qu’il y aura à la fin un pot de l’amitié et qu’il faut un minimum d’organisation pour que tout se passe bien. Ceci dit, si vous n’avez pas encore réservé, il n’est pas trop tard. Et puis si vous oubliez de réserver, venez tout de même le dimanche 13, on vous trouvera bien une petite place.
Parmi les artistes qui vont se produire dans ce concert exclusivement consacré à la gent à 6 pattes, il y a un chœur : le Chœur des Aulnes. C’est une association amie, car nombreux sont les choristes qui adhèrent à L’Agrion de l’Oise. Les deux associations partagent même quelques administrateurs.
Certains d’entre vous sont peut-être aller visiter le blog du Chœur des Aulnes. Alors ils ont pu lire ceci :
[Le Chœur des Aulnes] nous avait déjà proposé une puce l'an dernier, celle de Thierry Machuel se cachant dans les pans d'une houppelande. Là il revient avec un grillon qu'il chante en italien, une autre puce en vieux françois, un criquet en anglais alors qu'il est hongrois, et même une folle danse de lucioles en japonais. Décidément ce chœur est polyglotte.
Vous avez ainsi déjà une petite idée du programme vocal. Alors comme il est question d’un criquet en anglais alors qu’il est hongrois, L’Agrion de l’Oise vous doit quelques explications. Le Chœur des Aulnes va effectivement chanter en anglais un chant initialement écrit en hongrois, en magyar donc. Il s’agit d’un chant du folklore hongrois revisité par le compositeur Béla Bartók (1881-1945).
Mais pour vous en dire plus, L’Agrion de l’Oise ouvre son blog au chroniqueur du Chœur des Aulnes, ayant pu nous procurer un article destiné à instruire et distraire les choristes, d’où un ton qui se veut, vous le constaterez, humoriste, se gaussant un peu de L'Agrion de l'Oise..
En cette année 2015, nous commémorons au Chœur des Aulnes deux événements majeurs qui nous touchent particulièrement, l’un dans le domaine musical, l’autre dans le domaine entomo-scientifique.
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Il s’agit d’une part du 70ème anniversaire de la mort de Béla Bartók, ce musicien hongrois dont nous avons l’honneur d’interpréter une des œuvres, et d’autre part du 2ème anniversaire de la naissance de l'Agrion de l'Oise, cette prestigieuse association qui fait tant pour la connaissance des hexapodes, thème de notre concert du mois de décembre.
S’il vivait encore aujourd’hui, Béla Bartók serait à n’en pas douter un adhérent d’honneur, voire cotisant, de l’Agrion de l’Oise, car, en plus de son intense activité de compositeur, il s'intéressait à la botanique, à la géologie, à l'astronomie, aux oiseaux et … aux insectes qu’il collectionnait, comme il collectionnait et retranscrivait les chants populaires de son pays et des contrées qu’il visitait afin de leur redonner vie et les tirer de l’oubli.
Voici ce qu’il écrivait :
« En ne nous bornant qu'à réunir et à classer des chants, nous ressemblerions à un entomologiste qui se contenterait de faire collection de diverses espèces de scarabées et de papillons, et de les conserver : il constituerait ainsi un ensemble de choses inertes, arrachées à la vie, et c'est pourquoi le véritable naturaliste non seulement rassemble et conserve ces insectes, mais s'applique également à étudier et à décrire les détails les plus cachés de leur existence. Il est vrai que la description la plus colorée ne rendra jamais la vie à un corps mort, mais, du moins, un peu du goût et de l'odeur de la vie aura pénétré dans le laboratoire. Des raisons du même ordre commandent au collectionneur de musique populaire d'explorer à fond tout ce qui permet de pénétrer la réalité musicale vivante. »
Collectionner les airs populaires et collectionner les insectes, c’est donc un peu la même chose. L’Agrion de l’Oise et Béla Bartók sont faits pour s’entendre.
Les puristes que nous sommes sont toutefois chagrinés à l’idée de devoir chanter Bartók dans la langue de Shakespeare. N’a-t-il collecté et retranscrit tous ces chants populaires, lui qui a été jusqu’à étudier neuf langues pour mieux s’en imprégner, pour que des décennies plus tard une petite chorale française de village choisisse de chanter sa chanson du criquet en anglais ? A quoi cela eut-il servi que Bartók il se décarcassât ?
Le hongrois est difficile ? Moins que le polonais. Nous avons jadis appris un chant en polonais, rappelez-vous. Si nous pouvons chanter en polonais, nous pouvons chanter en hongrois. Quand on veut, on peut.
Nous ne disposons pas de la version de cette chanson en hongrois, nous objectera notre chef de chœur. Objection rejetée, car Battement de Chœur (NdR. Le titre de la feuille mensuelle du Chœur des Aulnes), qui a réponse à tout, vous offre gracieusement ci-après la version originale de la chanson du criquet.
A la demande générale, nous remplacerons donc sur nos partitions :
“cricket's getting wed tonight to the spider's daughter,
gnats and flies will tend the bride,
feed her flies and water”
par :
”tücsök egyre sze ma este a pók lánya
szúnyogok és a legyek is inkább a menyasszony ,
megetetni legyek és víz”
…. et longue vie au criquet magyar !
Voilà, vous avez une idée de ce qui vous attend pour ce concert.
NdR; La représentation de Béla Bartók est une aquarelle de son cousin Ervin Voit, empruntée au site Bibliolore "the Rilm blog", que nous remercions. Vous pourrez y entendre un extrait de Mikrokosmos, le Journal de la Mouche, que vous retrouverez peut être au concert sous les doigts de Christophe Chauvet
Mais revenons à notre criquet. Rassurez-vous ce chant est plein d’humour. Il s’agit du mariage du criquet et de la fille de l’araignée, contre nature donc – insecte à 6 pattes et arachnide à 8 - mais faisant honneur à la diversité. La belle-famille n’est pas très contente, oui mais laquelle ? Celle du criquet ou celle de l’araignée ?
Mais au fait, dans la nature, comment fait le criquet pour chanter ?
Mâle ou femelle, le criquet frotte l’intérieur de son fémur, muni d’une rangée de crêtes, contre certaines nervures renforcées de son aile, faisant vibrer cette dernière. Certaines parties des ailes vibrent plus vite que la cadence des frottements. Le criquet produit ainsi un son de 2 à 5 kilohertz.
Au fait, il sera aussi question d’un autre orthoptère dans ce concert, un fameux grillon chanté en italien . Par les grandes chaleurs, il chante longtemps, longtemps, très longtemps… toujours au même endroit et ... amoureusement…
Sachez que le chant du grillon n’est pas produit de la même façon que celui du criquet.
Chez le grillon mâle, la chanterelle située sur l’élytre gauche, frottée sur la râpe située sur l’élytre droit, produit un son d’environ 5 kilohertz. Celui-ci est amplifié par deux régions de l’élytre, la harpe et le miroir. Le son n’est produit qu’au cours de la fermeture des élytres.
Je remercie le Palais de la Découverte, qui ainsi explique et mais fait aussi entendre les chants du criquet, de la sauterelle, de la fourmi et de la cigale. C’est là que la photo des criquets a pu être faite, ainsi d’ailleurs que celle de l’araignée. Je recommande aussi la visite commentée de sa section "fourmis" avec les fourmis champignonnistes..
Alors venez écoutez chanter le Chœur des Aulnes à ce concert du dimanche 13 décembre.
Mais le Chœur des Aulnes sera bien entouré pour ce concert. La partie instrumentale sera encore plus riche. Vous pourrez découvrir d’autres ordres que celui des orthoptères au travers des notes de ce bestiaire entomologique, avec le piano de Christophe Chauvet, le violon de Pierre Cesmat et la flûte traversière de Camille Carpentier, sans oublier la conteuse Anne Daucy qui honorera le centenaire de la mort de Jean-Henri Fabre par une lecture tirée des Souvenirs entomologiques.
Et bien d'autres choses encore !