Publié le 27 Avril 2019

Hanneton commun femelle ©Joël Tribhout

Hanneton commun femelle ©Joël Tribhout

Je reviens sur l’article « Comment tirer profit des Hannetons » faisant état de l’abondance de ce coléoptère pour montrer une des raisons pour lesquelles on n’en voit nettement moins que par le passé.

Dans les années 50, la future LPO s’inquiète de la disparition des oiseaux et met en avant leur utilité dans la destruction des insectes, ravageurs des cultures.

« Pour remplacer l’Insectivore que la nature avait donné à l’homme, celui-ci a conçu l’Insecticide. » peut-on lire sous la plume de Gaston Smet, président de la Fédération Sérinophile et Ornithologique de France, membre de la Ligue française pour la Protection des Oiseaux, dans le n°22 du Journal des Oiseaux de janvier-février 1951. La Ligue lutte contre l’utilisation massive du D.D.T. (dichlorodiphényltrichloroéthane), puissant insecticide, massivement utilisé après la 2ème guerre mondiale.

Dans le même Journal des Oiseaux, je relève quelques mois plus tard dans le n°30 de mai-juin 1952, à la page intitulée Tribune de la Ligue Française pour la Protection des Oiseaux, un éditorial du Prince Paul Murat, Président de la Ligue Française pour la Protection des Oiseaux. Le voici in extenso :

 « Genre d’insectes coléoptères des régions tempérées, le hanneton vole lourdement, au figuré et familièrement : étourdi » : définition du dictionnaire Larousse.

Le hanneton est essentiellement herbivore, il cause, de grands dégâts, mais c'est surtout sa larve, le ver blanc, qui produit le plus de ravages, coupant les racines des jeunes plantes, en particulier les racines des betteraves ; sa vie sous- terre dure trois ans, c'est en effet Ia troisième année, après la ponte que, devenu hanneton, il sort de terre, s’envole et se pose sur les arbres, dévore les jeunes feuilles, puis le hanneton descend au sol pour pondre et meurt. Un nouveau cycle commence.

C'est au moment où les vols de hannetons se produisent que les attaques par pulvérisation commencent, d’une manière spectaculaire et tapageuse. Les destructions sont massives. Les chiffres de hannetons détruits sont impressionnants, sur les destructions de tous les autres insectes, c’est le silence ; la répercussion sur la faune, c'est également le silence. De loin en loin dans la presse, un article laisse entendre que, pour les abeilles, il n'y a rien à craindre, les pertes sont insignifiantes. Tous, nous connaissons des apiculteurs, il suffit de les écouter parler pour savoir que c'est une catastrophe. Il n’est pas un ami de notre faune ornithologique qui n'ait observé que, dans les bois, les remises, les garennes, si pleins de chants en avril et mai, après les traitements, c’est le vide, et comment en serait-il autrement, même en admettant que les poisons n'agissent pas sur les oiseaux, ceux-ci ne peuvent plus se nourrir, ni nourrir leurs petits, puisque les insectes, Ia principale pâture de tous les oiseaux des bois qui élèvent des jeunes, sont morts, les oiselets au nid meurent de faim et les parents vont au loin chercher tranquillité et pâture.

L'opération hanneton est d’un prix élevé : quatre mille francs par hectare, avons-nous tous pu lire dans la presse, qui paye le syndicat des producteurs de betteraves, les ressources du syndicat viennent de ses adhérents, les producteurs de betteraves, qui, bien entendu, sont obligés de comprendre cette dépense dans le prix de revient des betteraves vendues à la sucrerie. C’est donc, en définitive, nous tous, les consommateurs, qui faisons les frais des opérations spectaculaires qui, si elles détruisent les hannetons par irritation du système nerveux (nous avons tous pu voir mourir, dans une agitation frénétique, des mouches attaquées au D.D.T. et autres produits similaires), ne sont peut-être pas sans action sur le système nerveux des petits mammifères, des poissons et des batraciens.

 

Hanneton commun ©Roger Puff

Hanneton commun ©Roger Puff

Pendant qu'à grands frais se poursuit l’Opération Hanneton, par ordre des préfets, les freux sont détruits parce qu'ils ont le malheur d’être de la famille des corbeaux.

Les freux nourrissent leurs jeunes uniquement de coléoptères, donc de hannetons, d’insectes, de vers blancs et autres, et même de petits rongeurs, ils sont, à l'époque des jeunes absolument utiles. A Etrepagny, il a été possible d’avoir une idée du nombre de hannetons détruits par les freux, en employant les mêmes méthodes que pour le poudrage, on a obtenu, en vingt-quatre heures, soixante à soixante-quatre hannetons au mètre carré, ce qui, pendant les seize jours de Ia nourriture au nid, donne neuf cent soixante hannetons au mètre carré. Il est juste de reconnaître que les freux ne sont pas électeurs, ne paient pas d’impôts et sont absolument désintéressés, la loi oblige leur destruction.

Ne serait-il pas possible de poursuivre en même temps que les opérations « Hanneton », une expérience « Freux ». Il serait intéressant que les producteurs de betteraves connaissent le bilan utile des Freux qui élèvent leurs petits dans les Corbeautières, ils sauraient, ainsi, où est leur intérêt bien compris, c’est facile, à peu de frais.

Le Hanneton est étourdi, on dit d’un être un peu bizarre : il a un hanneton dans le cerveau. II faut que les prix baissent, on entreprend une opération hanneton et on détruit les freux, une histoire de fous. »

Le Prince Paul Murat est ornithologue. Il descend de Joachim Murat (1767-1875), roi de Naples, et de son épouse Caroline Bonaparte (1782-1839), sœur de Napoléon 1er. Il a été président-adjoint de la Ligue Française pour la Protection des Oiseaux sous la présidence de Jean Delecour. Paul Murat et les autres fondateurs de ce qui allait être la LPO se sont donné pour mission la défense des oiseaux. Ils s’insurgent donc contre l’abus du D.D.T., insecticide puissant, utilisé dans l’Opération Hanneton, où il sera déversé largement dans des actions destinées à préserver les cultures et notamment la betterave.

Dans Combat du 30 avril 1953, le journaliste E. Mannoni décrivait dans son article L'Opération hanneton fait rage la guerre sans pitié livrée aux coléoptères, déclarés ennemis de l’agriculture nouvelle de l’après-guerre :

« Les hannetons sont assaillis de tous côtés [...]. On les nébulise, on les pulvérise, on les atomise. »

Nous ne sommes que 8 ans après Hiroshima et Nagasaki... la référence est forte.

Un article, publié en Suisse dans Journal et Feuille d’avis du Valais du 5 novembre 1954, donnait l’exemple de la Picardie :

« […] l'Opération Hanneton 1952 s'est étendue dans l'Oise sur une surface de 40.000 ha dont 25.000 ha en culture, et dans l'Aisne sur 60.000 ha. En tout donc sur 100.000 ha. Cet immense territoire a été littéralement nébulisé, poudre, inondé de produits chimiques à base d'Isomère Gama pur (HCH) de SPH ou de DDT ».

Hannetons de la Saint-Jean in copula (Amphimallon solstitialis) ©Joël Tribhout

Hannetons de la Saint-Jean in copula (Amphimallon solstitialis) ©Joël Tribhout

A juste titre la LPO voyait avant tout dans ces opérations le risque d’atteinte aux oiseaux insectivores et ne se posait pas en défenseur de l’insecte.

Le D.D.T. sera interdit dans la plupart des pays dès les années 1970 du fait de ses effets néfastes sur l’environnement et la santé. L’impact du livre de la biologiste américaine Rachel Carson « Silent Spring », en français « Le Printemps silencieux », publié en 1962 'en France en 1968, a largement contribué à son interdiction, qualifiant d’élixirs de mort les pesticides.

Mais comme on le sait, d’autres insecticides viendront remplacer le D.D.T. dans l’arsenal de lutte contre les ravageurs des cultures. C’est une longue histoire qui dépasse mon propos sur un insecte au vol balourd, qui sévit toujours. J’en veux pour témoin des invasions de millions de hannetons forestiers, Melolontha hippocastani, en 2015 dans les forêts alsaciennes et en 2016 dans les forêts de Laigue et Compiègne dans l’Oise. L’O.N.F. surveille au plus près les éclosions périodiques, les imagos ravageant les feuilles des arbres sur lesquels ils se posent en masse pour se reproduire, les larves sévissant ensuite trois ans durant en s’attaquant aux racines des jeunes pousses.

Comme quoi il y a encore des hannetons, mais pour combien de temps encore ?

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Publié le 20 Avril 2019

Blaps en position de défense (Blaps mucronata) ©Thomas Brown CC BY 2.0

Blaps en position de défense (Blaps mucronata) ©Thomas Brown CC BY 2.0

Je viens d’avoir l’occasion de suivre sur France 2 un excellent téléfilm en deux épisodes "Quand sort la recluse", mis en scène par Josée Dayan d’après le roman de Fred Vargas.

Le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg y est confronté à une redoutable bande de violeurs opérant depuis des années. Je ne vais pas vous résumer le film et surtout pas vous en "spoiler" le dénouement. Sachez qu’on y parle de la recluse, Loxosceles reclusa, une espèce d’araignée très discrète, qui se cache dans des trous, se nourrit d’insectes qu’elle débusque la nuit, et dont la piqûre serait mortelle. On y parle aussi de blaps et voilà ce que l’on en dit.

Le Blaps serait un gros coléoptère d’un noir mat, terne, sale, puant, vivant dans le noir, bouffeur d’excréments de rats et qui annonce la mort.

Je vais fouiller dans ma collection du Dictionnaire de la Conversation et de la Lecture, Paris Belin-Mandar 1838, et au tome V, je lis à l’article « BLAPS » :

Genre d’insectes de l’ordre des coléoptères, dont le nom grec signifie animal nuisible, qui est de couleur noire, marche lentement, vit dans les lieux obscurs, humides et sales des habitations, et répand quand on le touche une odeur fort désagréable

Le Bulletin de la Société entomologique de France relate à la séance du 27 septembre 1883, sous la présidence de M. L. Reiche, une intervention de M. de la Perraudière qui,

en montrant des Blaps trouvés dans les environs d'Aumale (Algérie), fait remarquer une particularité qui ne lui paraît pas encore avoir été signalée. Les Blaps, comme les Carabus, projetteraient, lorsqu'on les saisit, une liqueur corrosive pouvant causer une vive douleur et même de l'inflammation sur des organes délicats. En recueillant quelques-uns de ces insectes, son frère reçut en effet une faible partie de celte liqueur dans l'œil qui fut vivement enflammé.

Allons vers encore plus de détails. Dans la 3ème édition - parue en 1875 à la Librairie Hachette à Paris - de l’ouvrage Les Insectes de Louis Figuier (1819-1894), , voilà ce que je déniche :

La tribu des Piméliens, appelés autrefois Mélasomes, parce qu’ils sont presque tous habillés de noir, offre quelques ressemblances avec celle des Carabiens. Ils recherchent les endroits obscurs et fuient la lumière. On les trouve à terre, sous les pierres ; leurs mouvements sont lents, ils paraissent marcher avec difficulté. L’insecte le plus connu de ce groupe, c’est le Blaps, à odeur repoussante, qui habite les endroits sombres et humides, tels’que les caves, et ne sort de sa retraite que pendant la nuit. Ses élytres sont soudés et dépourvus d’ailes. Le vulgaire les regarde comme un présage de mauvais augure. On a nommé l’espèce la plus commune, le Blaps porte-malheur, présage-mort, sorcière de la mort, etc.

Mais comme certains le savent, je suis très attaché à un entomologiste méconnu, dont le rêve était un Insectarium à Paris. Je veux nommer Alphonse Labitte.

n°4 du 10 octobre 1905 (collection personnelle)

Avant de faire une brève carrière sur ses vieux jours comme attaché au Muséum national d’Histoire naturelle, il édite en 1905 une petite revue trimestrielle L’Amateur d’Histoire naturelle (pierres, plantes et bêtes), à l’adresse du 29 rue Notre-Dame de Nazareth (Paris 3ème), peut-être celle de l’imprimeur. Il n’y aura que cinq parutions. Mais comme dans toute revue qui se respecte, il y a une rubrique Correspondance. En réponse à Mlle Rose D. de Rouen, De Camprémy (c’est le pseudonyme d’Alphonse du nom du village de naissance de son père dans l’Oise) écrit :

Oui, Mademoiselle ce coléoptère tout noir, un peu luisant, dont les élytres sont finement ponctués, si finement qu’elles paraissent presque lisses, et terminées en pointe, est le Blaps mortisaga (Blaps porte-malheur ou Blaps présage de mort) ; on l’appelle ainsi, parce que le vulgaire le regarde comme un animal de mauvais augure. Cependant, en Egypte, les femmes turques apprécient autrement cet insecte. D’après le naturaliste Fabricius, ces dames font revenir dans le beurre ce coléoptère et le mangent dans le but de s’engraisser. Le Blaps présage de mort vit dans les endroits sombres et humides.

J’ai voulu trouver d’autres informations sur cette entomophagie. Sans remonter à Fabricius, un article du Bulletin d'insectologie agricole : journal mensuel de la Société centrale d'apiculture & d'insectologie, du n°8 d’août 1886, intitulé Insectes et Crustacés comestibles, signé par L. Moleyre, préparateur au Muséum, est probablement la source d’Alphonse Labitte. Après avoir détaillé un certain nombre d’insectes comestibles et de régimes alimentaires de par le monde, voilà ce qu’il nous dit à propos du Blaps :

Nous n'avons plus à citer qu'un genre d'Insecte, et vraiment ceux qui le connaissent se feront difficilement à l'idée qu'il puisse être employé dans l'alimentation. Il l'est cependant et voici dans quelles circonstances : Chacun sait qu'en Orient l'embonpoint, même un peu excessif, est regardé comme un des signes les plus caractéristiques de la beauté féminine ; mais on sait moins le moyen employé par les dames pour acquérir ces formes pleines, ces contours voluptueux si recherchés des Orientaux et par suite des Orientales. Ce moyen, le voici : toutes les fois que vous rencontrerez un Blaps, c'est-à-dire un de ces insectes noirs, qu'on voit se traîner gauchement, sur des pattes qui semblent trop longues, au pied des murs, dans les caves et dans toutes sortes d'endroits obscurs et malpropres, saisissez-le (avec précaution pour éviter de recevoir sur les doigts un liquide infect qu'il a la mauvaise habitude de lancer toutes les fois qu'on l'inquiète), et conservez-le dans un bocal quelconque, ce qui n'est pas difficile, attendu qu'il peut vivre pendant plusieurs mois aux dépens de la provision de graisse qu'il a emmagasinée dans son tissu adipeux. Lorsque vous aurez réuni de la sorte un certain nombre de Blaps, faites-les cuire dans du beurre et vous aurez (sauf peut-être un tour de main culinaire que les auteurs dont j'invoque le témoignage ont négligé de préciser) le remède contre la maigreur employé chez les Turcs (la dose est de trois blaps tous les matins). En disséquant des Blaps, j'ai pu constater que les tissus de ces insectes, dépouillés de leur écorce noire, sont loin d'avoir un aspect répugnant ; mais j'ai trouvé aussi dans la dernière portion de l'abdomen deux glandes réniformes d'un certain volume remplies de ce liquide huileux et infect que l'animal peut projeter à une grande distance, pour mettre en fuite ses ennemis. Malgré cette particularité répugnante, s'il est vrai, comme des auteurs très sérieux l'affirment, que les Orientales mangent des fritures de Blaps, c'est qu'elles pratiquent à tout prix la maxime : « Il faut souffrir pour être beau. »

Alphonse Labitte

Après 1905, Alphonse Labitte (1852-1934) est reconnu comme amateur éclairé et est admis dans les murs du Muséum et doté d’un coin de labo en sous-sol. Il se montre très habile pour faire connaitre ses travaux et ses points de vue. Il fait partie de la Société nationale d’Acclimatation et participe aux séances. On trouve mention dans le Bulletin de la Société nationale d’Acclimatation de France pour la séance de la 4ème section Entomologie du 13 janvier 1908 où il rapporte les changements de couleurs des coléoptères Carabus monitis qu’il élève depuis plusieurs années et sur ses nécrophores qui consomment volontiers de la viande de cheval. On le retrouve à la séance du 8 décembre 1913 de la 3ème section Aquiculture, où il fait part de la longévité de son Blaps gigas, qui vit dans son labo depuis juillet 1905.

Le temps passe. Le Figaro du 5 juin 1914 affiche en première page sous le titre La Vie de Paris – Un ami des insectes » un article de François Poncetton. Il y est dit que le Muséum n’a toujours pas d’insectarium, mais selon Edmond Perrier « un fervent attaché à son Muséum d’histoire naturelle s’est dévoué depuis des années, avec ses seules ressources, à organiser une manière de ménagerie d’insectes. » Le laboratoire d’Alphonse Labitte est obscurément caché dans une annexe du Muséum, de l’autre côté de la rue Buffon.

Le journaliste indique que le labo est installé dans un coin du laboratoire de biologie souterraine de M. Viré, que Labitte ne reçoit aucun subside du Muséum, à part ce misérable local humide : « Que saurait désirer de plus cet indépendant qui juge intéressant d’abord d’étudier dans leurs mœurs des bêtes vivantes avant que de les entasser en belles lignes régulières dans des boites ? » Bien sûr il a reçu quelques dons par ci par là… Sa gloire est un Blaps vieux de huit ans…

Le journaliste annonce cela étant une exposition internationale d’insectes vivants au Jardin d’Acclimatation où il espère que le bon M. Labitte sera à l’honneur. Il conclue en « salu[ant] l’humble savant qui, le premier, s’est dévoué avec un zèle infatigable et beaucoup de science à acclimater quelques insectes de France entre les murs de son laboratoire. »

Dans son laboratoire du Muséum

Enfin le n°2, année 1916, du Bulletin du Muséum national d'histoire naturelle, relate pour la séance du 24 février une communication de notre ami Alphonse. Le titre en est Longévité de quelques insectes en captivité. En voilà l’extrait relatif au Blaps.

Jusqu'à présent, nous n'avons que très peu de connaissances sur la longévité des Insectes. La cause provient de ce que rares sont les Entomologistes ayant eu en leur possession et en captivité des Insectes vivants. Depuis ma jeunesse, passionné pour l'Histoire naturelle, désireux surtout d'observer les petits êtres méprisés par le commun des hommes, j'ai possédé, en captivité, pour étudier leurs mœurs, des Insectes de tous ordres, principalement des Coléoptères ; grâce à cette circonstance, et pour quelques-uns, j'ai pu mesurer la durée de leur existence. Je ne parlerai ici que de l'Insecte adulte pris à sa transformation à l'état parfait, issu de sa nymphe, ou capturé par moi, ou reçu à l’Insectarium en don par une main généreuse ; c'est à partir de cet instant que j'ai compté les jours de sa vie.

Je laisse volontairement de côté le laps de temps que l'animal a vécu dans son état larvaire. On devra cependant noter que celui-ci est, en général, d'autant plus court que l'état adulte est plus long. Une larve de Blaps, par exemple, avant sa dernière métamorphose, vit deux ou trois mois, tandis qu'une larve de Hanneton vit deux et trois ans. Les chiffres que je présente sur la durée de l'existence des insectes qui ont vécu en captivité dans ma ménagerie sont rigoureusement exacts ; ils portent sur des centaines d'individus que j'ai pu suivre et observer depuis plus de vingt ans, non seulement au point de vue qui m'occupe aujourd'hui , mais aux points de vue biologique, psychologique et physiologique :  j'ai publié quelques-unes de mes observations dans différentes revues; les Entomologistes que ces questions intéressent peuvent s'y reporter.

Ces revues sont Mercure de France, La Science et la Vie et Agriculture nouvelle. En amateur Alphonse prétend donc avoir élevé des coléoptères depuis 1896, très certainement dans sa maison de campagne à Marsauceux en Eure-et-Loir.

L’article donne la longévité pour un certain nombre d’espèces. Au chapitre relatif aux Blaps il relate :

J'avais pris le 15 septembre 1904, à Paris, au quai de Javel, dans une cour d'usine, 14 Blaps mortisaga. 8 de ces Insectes sont morts à différentes époques, entre le 15 septembre 1904 et le 31 décembre 1910. A cette dernière date, les 6 Blaps survivants furent dévorés par les Rats. Ils vécurent donc dans la ménagerie jusqu'à cet accident 2.297 jours. Un Blaps, entré dans la ménagerie le 8 juillet 1911, vit encore.

Pour Blaps gigas : 8 de ces Insectes, entrés dans la ménagerie le 6 juillet 1905, vécurent jusqu'au 31 décembre 1910, où 7 d'entre eux furent dévorés par les Rats. Ils ont donc vécu 2028 jours en captivité. Le survivant a vécu jusqu'au 14 décembre 1914, soit 3449 jours.

Pratiquement 9 années et demi, mais les rats ont eu raison de ceux qui « bouffaient leurs excréments » et c’est là que je conclus. Que cela ne vous empêche pas de déguster les romans de Fred Vargas.

Nota : les photos d’Alphonse Labitte ont été publiées dans Le Monde illustré, n°2894 du 14 septembre 1912 (collection personnelle).

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Publié le 13 Avril 2019

Il y a bien longtemps (en janvier 2014), ce blog était à peine créé, j’y évoquais Le petit Peuple des Ruisseaux, un ouvrage de Marcel Piponnier (Editions Bourrelier, Paris 1937), qui avait enchanté le jeune lecteur que j’étais (longtemps avant 2014…).

Dans cet ouvrage on pouvait lire au chapitre « Pilleurs d’épaves : Gerris et Hydromètres » :

"Qui n’a remarqué sur les eaux tranquilles la troupe agile des légers insectes noirs ? Ils glissent par vigoureux élans sur quatre longues pattes écartées en X.[…]

Ca ? disent les pêcheurs, installés sur la berge, ce ne sont que des araignées d’eau.

 Araignées d’eau ? A ne pas regarder de trop près, l’insecte peut rappeler ces grands Faucheurs, sautillant gauchement sur une couronne de huit pattes interminables, si fragiles qu’elles se détachent à la moindre prise ; tombées sur le sol, elles continuent leurs convulsions.

Araignée, ce long corps en navette, d’une seule venue ? Araignées, ces quatre fines pattes, nues et raides, leur extrémité souple appliquée sur l’eau ?

 Ce n’est qu’une simple et étroite punaise, l’Hydromètre des anciens naturalistes. Mais sous ce nom ils confondaient plusieurs insectes. Pour les auteurs modernes, c’est le Gerris des marais."

Assemblée de Gerris ©Joël Tribhout

Assemblée de Gerris ©Joël Tribhout

Me référant à Wikipédia :

"Gerris est un genre d'insectes hémiptères hétéroptères (même sous-ordre que les punaises) qui ont la capacité de se déplacer sur l'eau. On les appelle parfois « punaises d'eau », et communément, mais improprement « araignées d'eau » (sans doute du fait de leurs longues pattes). Leur adresse à se déplacer sur l'eau leur vaut aussi le nom de « patineuses » ou « patineurs de l'eau »".

Il s’agit donc d’une espèce de punaise, Gerris lacustra, proche cousine de la Nèpe ou de la Ranatre, lointaine cousine du Gendarme ou de la Cigale. Mais n’entrons pas dans les détails.

Dans une lecture récente, Histoire d’un ruisseau d’Élisée Reclus, un des précurseurs de l’écologie, je trouve au chapitre, Les sinuosités et les remous, ce passage où évolue un insecte patineur :

"[…] D’ailleurs, ce ne sont pas seulement des corps inertes qui rident la surface du ruisseau, ce sont des êtres vivants qui, en se déplaçant eux-mêmes, déplacent constamment le centre des ondulations. Un poisson qui passe comme un dard donne à l’ensemble des vibrations la forme d’un ovale très allongé ; l’insecte patineur, qui s’avance par élans successifs, laisse derrière lui deux sillages obliques enfermant des cercles inégaux ; une autre bestiole, une abeille peut-être, tombée du haut d’un arbre, se débat en tournoyant et en agitant ses ailes d’une telle vitesse que l’eau est ridée d’une myriade de lignes vibrantes entrecroisant leurs innombrables cercles. La bizarre figure de géométrie qui s’agite avec tant de vivacité est lentement emportée par le fil du courant ; mais voici qu’elle disparait tout à coup. D’une bouchée, un poisson vient d’avaler l’insecte et d’arrêter tout son cortège de lignes tournoyantes. "

Image de Gerris au fond de l'eau ©Joël Tribhout

Image de Gerris au fond de l'eau ©Joël Tribhout

Dans cet ouvrage paru en 1869, chez Hetzel à Paris, quelques pages plus loin, au chapitre La promenade, toujours dans un style d’une remarquable poésie, l’auteur décrit l’image au fond de l’eau des objets flottant à la surface :

"Quels que soient les contours de l’objet flottant, ils apparaissent toujours fortement modifiés par la lumière : la feuille, déployée en cœur ou prolongée en fer de lance, prend sur le fond l’aspect d’un disque ou d’un ovale ; la paille ou le jonc devient une rangée de petits cercles pareils à un collier dénoué ; l’araignée d’eau, patineur insubmersible qui remonte le courant par des élans soudains, est représentée sur le lit de sable ou de vase par cinq petites rondelles, dont l’une la plus petite, figure les deux pattes de devant, tandis que les quatre autres, groupées deux par deux, se rapprochent et s’éloignent suivant les mouvements de l’animal. Autour de chaque disque noir ou grisâtre, un cercle de lumière s’arrondit comme un cercle d’or pur : ombres et rayons, changés par le milieu qu’ils traversent, se suivent sur le fond et en varient incessamment l’aspect."

Le Gerris vu de près ©Joël Tribhout

Le Gerris vu de près ©Joël Tribhout

Quelques mots sur Élisée Reclus. Dans la préface de la réédition en 2017 de l’ouvrage chez Arthaud Poche, Les Fondamentaux de l’Écologie, Aymeric Caron écrit : "Si le nom d’Élisée Reclus a sa place au panthéon des écologistes précurseurs, c’est aussi parce qu’il fut le premier en Europe à établir un lien entre écologie et politique. "

Jacques Élisée Reclus est né à Sainte-Foy-la Grande en Gironde en 1830. Jacques, son père, est un pasteur protestant, qui aura 17 enfants, dont 14 vivront. Élisée est géographe, pédagogue et écrivain prolifique. Ses ouvrages majeurs sont La Terre en 2 volumes, sa Géographie universelle en 19 volumes et L’Homme et la Terre en 6 volumes. Il a voyagé notamment en Amérique du Nord et du Sud, où il envisageait un moment de s’installer. Mais c’est aussi un Communard, banni en Suisse en 1871, et un théoricien anarchiste. Son frère ainé, Elie, auteur de La Commune au jour le jour, qui comme lui vivait à Bruxelles, y décède en février 1904 ; Élisée le suit de peu, succombant en juillet 1905.

Pour en savoir plus sur cet homme remarquable, je ne peux que vous conseiller d'aller consulter l'article très complet sur le site de Wikipédia…

Je terminerai cependant sur un passage d’un autre ouvrage d’Élisée Reclus : Du sentiment de la nature dans les sociétés modernes, paru en 1866, et récemment réédité par la Bibliothèque nationale de France :

"Que le savant examine les nuages ou les pierres, les plantes ou les insectes, ou bien encore qu'il étudie les lois générales du globe, il découvre toujours et partout des merveilles imprévues ; l'artiste, en quête de beaux paysages, a les yeux et l'esprit en fête perpétuelle ; l'industriel qui cherche à mettre en œuvre les produits de la terre ne cesse de voir autour de lui des richesses non encore utilisées. Quant à l'homme simple qui se contente d'aimer la nature pour elle-même, il y trouve sa joie, et quand il est malheureux, ses peines sont du moins adoucies par le spectacle des libres campagnes."

Préservons la biodiversité...

J'oubliais. Élisée Reclus en avait-il conscience ? Le Gerris, qui se déplace en patinant sur l'eau grâce aux poils très hydrophobes de ses pattes que la tension superficielle de l'eau repousse, est un excellent bio-indicateur de la qualité des eaux. Si les eaux sont polluées par des détergents (tensioactifs), ses pattes ne peuvent plus le porter, il plonge...

Préservons les Gerris qui marchent sur l'eau...

 

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Publié le 7 Avril 2019

Hanneton commun ©Joël Tribhout

Hanneton commun ©Joël Tribhout

Bien souvent je rencontre des personnes qui me disent « On ne voit plus de hannetons. Quand nous étions enfants, en mai, il y en avait énormément. On les attrapait, on les mettait dans une boite d’allumettes ou en leur attachait un fil à une patte pour les faire voler en tournant autour de nos têtes ».

Il vous parle d’il y a 50 ou 60 ans. Ce n’est pas faux, on en voit moins aujourd’hui, encore que je trouve dans la Voix du Nord du 27 octobre 2018 le titre suivant « Valenciennois : dans le match face aux hannetons, les pelouses de foot contre-attaquent ». L’article relate une invasion de larves provoquant de gros dégâts sur les pelouses de terrains de football. La même année, plus tôt en mai, D!ICI TV fait état d’une invasion à Saint-Crépin dans les Alpes du Sud. Un jardinier nous en présente une pleine poignée.

 Si je remonte à 2017, je trouve sur un site Internet belge, rtbf.be, le titre « Chaleur : les hannetons nous envahissent » à la date du 21 juin. Je lis « Si le hanneton est de sortie en ce premier jour de l'été, c'est à cause de la chaleur, mais aussi de l'hiver doux que nous avons connu. Il n'a pas vraiment gelé en profondeur, ce qui a favorisé la survie des larves. Du coup, pour l'instant, les hannetons volent partout autour des arbres. Vous les voyez débarquer en début de soirée, quand le soleil est encore présent. Les mâles et les femelles se rapprochent en ce moment avant l'accouplement. » L’article précise que le hanneton est inoffensif et ne pique pas et qu’il est inutile d’appeler les pompiers… Le 3 août Ouest-France titre « Les hannetons empoisonnent les soirées des Loudéaciens ». Un habitant interviewé témoigne « Je les ramasse le matin, j’en ai plein mon aspirateur ».

En 2015, un media belge Sudinfo annonce le 3 juillet « Les hannetons envahissent le Belgique ! Un spécialiste nous explique pourquoi ils sont si nombreux ». Ce dernier Frédéric Francis, de la Faculté Agro-Bio Tech de Gembloux, explique : « Avant d’être à leur état adulte, tel qu’on les observe dans les airs, les hannetons restent environ trois ans à l’état larvaire. À la fin de ce cycle, après un état de chrysalide, la forte chaleur accélère le cycle de sorte à ce que les hannetons sortent pratiquement tous en même temps, alors que la fin de cycle se manifeste de manière plus échelonnée par des températures moindres. L’autre aspect est qu’en cas de très fortes chaleurs, le hanneton va avoir tendance à se cacher, et ne sortir manger qu’une fois les températures plus douces. Raison pour laquelle tous vont sortir en même temps, en début de matinée ou en fin de soirée ». Mais l’article précise aussi qu’on n’en a pas vu autant depuis au moins 15 ans.

En 2012, Vosges Matin du 10 mai déclare : « Hannetons : la grande invasion » et un autochtone du côté des sources de la Saône ajoute « Sur les hauteurs de Godoncourt, près de Monthureux-sur-Saône, l’éleveur de moutons ramasse des seaux de hannetons lorsqu’il secoue les arbres fruitiers de ses pâturages. » Il les fait griller dans la chaudière … En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées.

Mais projetons-nous encore plus dans le passé.

Hanneton commun ©Roger Puff

Hanneton commun ©Roger Puff

Je trouve dans un petit fascicule Jardins & Basses-Cours daté du 5 août 1909, il y a donc presque 110 ans, un article intitulé « Comment tirer profit des hannetons ». Le voici in extenso :

« On sait combien le Hanneton est nuisible à l’agriculture, et sa destruction est un devoir pour chacun. Mais quand les Hannetons sont ramassés sous les arbres secoués aux heures où ces Insectes font leur sieste, que faire de la récolte ? Un excellent engrais ou bien une très bonne huile à brûler, au choix ! »

« Pour faire de l’engrais de Hanneton, creusez une fosse dans un terrain argileux, ou bien servez-vous d'une fosse à purin. Dans cette fosse, mélangez les Hannetons tout vivants avec de la chaux vive délayée dans de l’eau, de façon à former une crème semi-liquide. Ajoutez de la terre remuée et formez ainsi une pâte qui constituera après quelques jours de macération un excellent engrais riche en azote. »

« Mais voici une manière bien plus profitable d’utiliser les Hannetons, c’est d’en faire de la graisse ou de l'huile à brûler qui peuvent servir à l’éclairage ou au graissage des voitures et instruments agricoles. »

Extrait de L'Art de l'Éclairage par Louis Figuier, 1887

Extrait de L'Art de l'Éclairage par Louis Figuier, 1887

« Pour obtenir l'huile de Hanneton, écrasez ces Insectes dans un grand tonneau défoncé d’un bout, ou encore sous une meule, de façon à en former une pâte homogène. Abandonnez cette mixture dans le tonneau pendant trois ou quatre mois ; au bout de ce temps, vous verrez surnager une huile limpide que vous décanterez avec soin.  Au-dessous de cette couche d’huile, vous trouverez une boue noirâtre qui sera filtrée sur une toile tendue, de façon à en faire encore écouler une certaine quantité d'huile ; le résidu fera de l'engrais. Cinq cents litres de Hannetons, faciles à récolter pour le plus grand bien de vos champs, vous donneront environ cent litres d’une excellente huile, susceptible de brûler sans aucune odeur dans les lampes ordinaires avec une belle flamme blanche très éclairante. »

« Pour faire de la graisse de Hannetons, prenez une marmite en terre ou grès vernissé à laquelle vous adaptez une tubulure au niveau du fond. Emplissez-la avec les Insectes que vous pouvez tuer au préalable par un moyen quelconque. Couvrez la marmite de son couvercle et faites cuire sur un feu très doux. La graisse de Hannetons s’écoulera par l'orifice inférieur sous forme d’un liquide onctueux qui devient grisâtre en refroidissant. Cette graisse est excellente pour les essieux des voitures ou chariots ; elle peut aussi brûler dans les lampions ou veilleuses à mèche. »

« La valeur de l’huile de colza à brûler ou de la graisse animale atteignant généralement plus de 1 franc le kilogramme, cette utilisation des Hannetons est du plus grand intérêt. »

« II y aurait certainement lieu de tirer le même parti des criquets d’Algérie, qui renferment, comme nos Hannetons, une matière grasse à laquelle ils doivent une bonne partie de leur valeur comestible bien connue des Arabes. »

L'article est signé René Champly. Ce dernier, ingénieur-mécanicien né en 1865 et mort en 1940, est l'auteur de nombreux ouvrages pratiques, notamment une « Nouvelle encyclopédie pratique du bâtiment et de l'habitation, rédigée avec le concours d'architectes et d'ingénieurs spécialistes, en 15 volumes » parue entre 1910 et 1914 à la Librairie générale scientifique et industrielle, H. Desforges à Paris.

Hanneton commun ©Martina Granziera, sélectionnée Concours Photos "Insectes de France" 2018

Hanneton commun ©Martina Granziera, sélectionnée Concours Photos "Insectes de France" 2018

Aujourd’hui s’il y a bien périodiquement çà et là des invasions de hannetons, je ne pense pas qu’on puisse dans les conditions économiques actuelles se lancer à domicile dans la production d’engrais, d’huile d’éclairage, ou de graisse de hannetons. Vers 1909, 1 franc représentait un pouvoir d’achat de 0,40 euros. Combien coûte aujourd’hui 1 kilogramme d’huile de colza ? En janvier 2019, l’huile cotait environ 850 US$ à la tonne (brut FOB Rotterdam), elle était retombée à 830 US$ en février. Il vous reste à convertir en euros, le cours du dollar du jour est à 0,89 €. Simplifions à 0,90 € par dollar et 840 dollars à la tonne, soit 0,75 € le kilo d’huile de colza, pratiquement le double de 1909. Ce serait donc rentable ? Reste cependant à se faire livrer chez soi, puisque le prix que je vous donne est FOB, c’est-à-dire encore sur le bateau…

Trêve de plaisanterie. Vous vous voyez en train de manipuler des fûts de hannetons morts ou vifs pour en faire du combustible ? Vous vous voyez sacrifier des kilos de hannetons pour en faire de la graisse à essieu ? D’autant qu’aujourd’hui il est préconisé pour respecter le bien-être animal de sacrifier les insectes destinés à l’alimentation en les passant au congélateur pendant une nuit… Faut tenir compte du coût de l’électricité…

Peut-être qu’un jour, si le pétrole vient à manquer et si la pollution cesse faute de production de pesticides et autres produits industriels, reverra-on des myriades d’insectes dans nos cieux les soirées de mai-juin. Alors nous pourrons les capturer et en faire de l’huile pour alimenter nos quinquets.

Trêve de plaisanterie bis. Aujourd’hui la production industrielle de farine d’insectes s’accompagne de production d’huile, mais, riche en acides gras insaturés et en omégas 3, 6 et 9, elle est réservée à l’alimentation ou à la fabrication de cosmétiques, et je ne vous parle pas de son prix...

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